NEWS DE L’EDITION – JANVIER 2024

« La refondation de nos aides est indispensable » (Jean-Philippe Thiellay, CNM)

Paris – Actualité n°312933 – Publié le 24/01/2024 à 15:00

 

« Les débats ont été vifs sur la taxe streaming ; ils sont derrière nous. Le Gouvernement et le Parlement ont tranché. Je réunirai les plateformes dans quelques jours pour travailler ensemble aux moyens de les aider à développer leurs activités, en explorant toutes les pistes dont l’ensemble de la filière, et notamment les ayants-droit, pourront bénéficier », déclare Jean-Philippe Thiellay, président du CNM, lors de ses vœux aux acteurs de la musique et de la culture, au Palais de la Porte Dorée (Paris 12e) le 23/01/2024. 

« Ces vœux sont l’occasion pour moi de vous parler du futur, du “nouveau CNM” qu’il faut mettre sur pied en 2024 » en « refondant [ses] modalités d’intervention », ajoute-t-il. « Cette refondation de nos aides est indispensable : maintenant que les sources de financement du CNM sont stabilisées et pérennes, il faut imaginer autre chose que la simple prolongation des dispositifs qui existaient avant 2020 », complète-t-il, précisant que « les dispositifs d’aides seront moins nombreux, plus simples et mieux adaptés à la vie des entreprises ».

« Il y aura, sans aucun doute, des évolutions quant aux aides, plus automatiques, quel que soit le nom qu’on leur donne, pour accompagner l’investissement, et aussi du côté des aides sélectives, amenées à l’être davantage encore pour cibler les projets qui contribuent à la diversité et qui prennent des risques artistiques. (…) Cela nous conduira à examiner des questions importantes, pour déterminer, au nom de la diversité, de la souveraineté, de la projection internationale, les types de projets et d’entreprises à aider. Nous rechercherons une meilleure cohérence avec les crédits d’impôts si importants pour les professionnels, dans le live, dans le phono et l’édition musicale, (…) ; nous rechercherons une meilleure articulation avec l’action culturelle des OGC », poursuit le président du CNM.

Jean-Philippe Thiellay cite par ailleurs « trois axes majeurs » dans les actions du CNM en 2024 : « la diversité à l’offensive », l’entrepreneuriat et « le défi des transitions ». News Tank publie quelques extraits de son discours.


« Notre modèle français et nos entreprises ont démontré leur résilience »

  • « (…) Ces vœux 2024 sont une première. Le CNM a quatre ans et c’est en effet la première fois que nous organisons une telle réunion. Dans la crise, nous avions bien d’autres soucis ; 2024 nous a semblé la bonne occasion, après tout ce que nous avons traversé et avec tout ce que nous avons à bâtir ensemble.
  • (…) On présente parfois la filière musicale comme un ensemble complexe, composite, manquant de cohésion. Mais regardons-nous un instant ! La diversité des genres musicaux, de vos métiers, de vos entreprises, de vos organisations professionnelles, est frappante. (…) Vous êtes la filière et cette diversité est une réalité magnifique. Elle est complexe sans aucun doute ; mais elle constitue une richesse formidable.
  • (…) Deux ans après la fin de la crise sanitaire, qui, dans le monde, a considérablement fragilisé la situation économique de nombreux acteurs, force est de constater, non seulement que notre modèle français et nos entreprises ont démontré leur résilience, mais que nous pouvons même nourrir de grandes ambitions. »

« Nous avons besoin de labels forts, notamment les indés »

  • « (…) Dans le domaine du spectacle vivant, les résultats 2023 démontrent l’appétit du public, avec le milliard d’euros de recettes de billetterie très largement dépassé. Pour autant, cette reprise s’est opérée de manière très hétérogène : à côté d’une dynamique très forte pour les jauges importantes, c’est de plus en plus difficile pour les productions de taille moyenne, pour les SMAC et la plupart des festivals.
  • Dans le champ de la musique enregistrée, on n’a pas encore retrouvé le niveau de chiffre d’affaires d’avant la crise du disque dans un marché très dynamique, mais la croissance élevée et continue, portée par l’offre numérique, ouvre des perspectives encore inenvisageables il y a peu.
  • De nombreuses questions nouvelles se posent, sur la découvrabilité des œuvres, sur la diversité exposée et jusqu’au mode de répartition des redevances issues du streaming : market centric versus user centric et désormais artist centric.
  • Dans ce contexte, nous avons besoin de labels forts, notamment les indés, et, j’insiste, de plateformes de streaming fortes et engagées. Le streaming est la plus belle invention et la meilleure nouvelle que la filière musicale a connue depuis des décennies !
  • Les débats ont été vifs sur la taxe streaming ; ils sont derrière nous. Le Gouvernement et le Parlement ont tranché. Je réunirai les plateformes dans quelques jours pour travailler ensemble aux moyens de les aider à développer leurs activités, en explorant toutes les pistes dont l’ensemble de la filière, et notamment les ayants-droit, pourront bénéficier.
  • En 2023, on a donc beaucoup parlé de musique et de soutien à la musique car les pouvoirs publics sont conscients des fragilités et des opportunités qui caractérisent le temps présent. »

« Quel sens voulons-nous donner aux interventions d’un établissement public comme le CNM ? »

  • « (…) Le CNM avait, je crois, fait la preuve de son utilité dans la crise ; il est aujourd’hui conforté pour une intervention plus structurelle, conforme à la loi et aux défis que nous devons relever. Ces vœux sont l’occasion pour moi de vous parler du futur, du “nouveau CNM” qu’il faut mettre sur pied en 2024.
  • Quatre ans après sa naissance, on peut se réinterroger un instant de raison. Quel sens voulons-nous donner aux interventions d’un établissement public comme le CNM ?
  • Ces interventions ont une justification majeure, qui s’inscrit dans la politique culturelle française qu’on a parfois qualifiée d’exception : avec indépendance, honnêteté intellectuelle, souci de l’intérêt général, il y a besoin d’observer, d’analyser le marché et de comprendre les tendances de l’industrie musicale ; il y a besoin d’un soutien public à la musique pour aider à fabriquer des succès, créer de la valeur, permettre aux artistes de demain de prendre leur envol, donner naissance à des œuvres qui, dans toutes les esthétiques, tous les territoires, sans coups de pouces, n’existeraient tout simplement pas, investir dans des lieux de spectacles à la hauteur des attentes du public. Le marché seul n’y suffit pas.
  • Avec le ministère de la Culture, nous le faisons, au quotidien et nous allons continuer en 2024, en refondant les modalités d’intervention du CNM.
  • Cette refondation de nos aides est indispensable : maintenant que les sources de financement du CNM sont stabilisées et pérennes, il faut imaginer autre chose que la simple prolongation des dispositifs qui existaient avant 2020.
  • De plus, si en 2024, nous avons encore quelques redéploiements de crédits antérieurs, il n’y en aura plus en 2025 et la taxe streaming nous permettra, tout juste, de maintenir nos interventions 2023. Pas de les développer.
  • (…) Dès les prochaines semaines, nous allons mettre à la concertation les grands principes de ces interventions en réunissant les professionnels dans des groupes de travail métiers par métiers et thèmes par thèmes.
  • Je ne pourrai pas ce soir aller plus vite que la musique, l’objectif étant une adoption par le CA de l’établissement au plus tard à la fin de l’année. Mais je peux tout de même vous indiquer que nos dispositifs d’aides seront moins nombreux, plus simples et mieux adaptés à la vie des entreprises, dans l’objectif de gagner du temps, de faciliter la vie de notre équipe également (…).
  • Je vous garantis un établissement qui restera agile, rapide, gouverné par la recherche des résultats, par l’objectivité des règles et des décisions (…).
  • Il y aura, sans aucun doute, des évolutions quant aux aides, plus automatiques, quel que soit le nom qu’on leur donne, pour accompagner l’investissement, et aussi du côté des aides sélectives, amenées à l’être davantage encore pour cibler les projets qui contribuent à la diversité et qui prennent des risques artistiques.
  • Ces aides inciteront au développement international et aux bonnes pratiques, environnementales bien sûr, mais aussi sociétales, pour l’égal accès des femmes et des hommes aux métiers de la filière. Cela nous conduira à examiner des questions importantes, pour déterminer, au nom de la diversité, de la souveraineté, de la projection internationale, les types de projets et d’entreprises à aider.
  • Nous rechercherons une meilleure cohérence avec les crédits d’impôts si importants pour les professionnels, dans le live, dans le phono et l’édition musicale, que nous continuerons à évaluer ; nous rechercherons une meilleure articulation avec l’action culturelle des OGC (…).
  • Je veux aussi souligner que nous continuerons à développer les interventions non financières de l’établissement : les études, y compris prospectives avec le CNMlab, notre laboratoire d’idées au contact du monde universitaire dont on attend le prochain recueil sur l’artiste autoproduit, enjeu majeur pour toute la filière ; les éditions ; la formation professionnelle. »

« Aller vers les 10 000 concerts réalisés à l’étranger »

  • « (…) En 2024 et au-delà, les actions du CNM seront, très résolument, tournées sur trois axes majeurs : la diversité à l’offensive ; l’entrepreneuriat ; le défi des transitions.
  • La diversité, la défense du pluralisme et de la liberté de création constituent la première de nos missions car elles sont menacées, par les difficultés économiques de certains modèles d’exploitation, par la concurrence internationale farouche ou par des extrémismes politiques. Mais au CNM, on ne voit pas la diversité comme la défense d’une citadelle assiégée.
  • La musique est un outil majeur de notre souveraineté culturelle et nous entendons le valoriser avec les territoires et les collectivités (nous organisons cette année des journées portes ouvertes en région) et sur le plan international, y compris avec une nouvelle direction des affaires européennes et internationales, créée le 01/01/2024.
  • (…) L’objectif et le cap sont clairs : atteindre bientôt les 500 M€ de revenus des artistes français à l’étranger quand on était aux alentours de 300 avant la crise ; aller vers les 10 000 concerts réalisés à l’étranger contre 5 000 en 2019. Nos entreprises, nos associations, nos ensembles ont les moyens d’y parvenir.
  • Concernant l’entreprenariat et l’innovation au sens le plus large du terme, le CNM est là pour encourager l’initiative et la prise de risque, qu’elle soit artistique, technologique, commerciale, quelles que soient les structures qui les portent.
  • C’est l’objet de nos aides financières bien sûr et notre programme dédié à l’innovation permet de mettre en valeur de formidables aventures (…).
  • Le CNM, c’est aussi du conseil, des formations spécifiques, des partages de savoir, des mises en relation et je vous donne rendez-vous à Lyon les 03 et 04/06/2024, à H7, pour nos rencontres de l’innovation et des transitions.
  • Enfin, parce que c’est déjà la réalité de celles et ceux qui font vivre la musique au quotidien dans notre pays, le troisième axe est celui de l’accompagnement face au défi des transitions.
  • La première transition est la transition écologique : le CNM est la cheville ouvrière d’une analyse concertée et indépendante. C’est dans cet esprit que nous avons lancé une étude sur les scénarios pour la filière à l’horizon 2050 (…).
  • La deuxième transition, une révolution sans doute, est celle de l’intelligence artificielle générative qui menace les droits des auteurs et autrices, des compositeurs et compositrices, des interprètes bien sûr, mais qui ouvre aussi de formidables opportunités, y compris pour composer et créer, ou mieux gérer ses droits (…).
  • Enfin, la troisième transition concerne la responsabilité sociale des organisations et notamment l’amélioration des conditions de travail dans notre filière, si importante alors que se posent des questions de rémunération, d’égalité, de diversité, d’attractivité et de recrutement. Là encore, le CNMlab y travaille pour poser le diagnostic et, très vite, passer à l’action avec les organisations professionnelles. (…) »