CNM : BUDGET 2021 À 201,5 M€, DONT 182,5 M€ DIRIGÉS VERS DES CRÉDITS D’INTERVENTION
Paris – Publié le jeudi 17 décembre 2020 – Actualité n° 203073
Le budget total, hors reports, du Centre national de la musique pour 2021 s’établit à 201,5 M€, « dont 170 M€ au titre du soutien de France Relance », annonce l’établissement le 17/12/2020. Ce budget, approuvé par le CA le 16/12/2020, sera affecté à « près de 91 % » à des crédits d’intervention en soutien aux professionnels, soit 182,5 M€.
« Alors que l’incertitude demeure sur les perspectives de reprise de l’activité, l’année 2021 s’annonce tout aussi singulière. Le conseil d’administration du CNM a adopté un programme d’action ambitieux avec deux objectifs transversaux : la sauvegarde des entreprises de la musique et des variétés et le soutien à la reprise et à la relance de l’activité », indique l’établissement.
Le conseil d’administration se réunira à nouveau, « fin janvier ou début février 2021 », pour « préciser les conditions de mise en œuvre des dispositifs. Le 16/12/2020, nous avons uniquement voté le budget », indique à News Tank Jean-Philippe Thiellay, président du CNM. Celui-ci évoque par ailleurs le protocole de lutte et de prévention contre le harcèlement et les violences à caractère sexuel, bâti avec les professionnels de la filière « pendant l’automne » 2020, également voté par le CA 16/12/2020. Les aides financières allouées par le CNM seront désormais conditionnées au respect de ce protocole. « C’est quelque chose d’assez fort, qui peut avoir des effets très bénéfiques. (…) Notre protocole va très loin et peut, je crois, faire école dans le secteur culturel, même s’il existe déjà des initiatives dans d’autres domaines. »
Le CA de l’établissement a, enfin, validé le programme d’études du CNM pour 2021, parmi lesquelles trois paraîtront en janvier :
• étude sur « l’impact » du passage au user centric dans le streaming, laquelle sera « complétée au cours de l’année par une étude sur la diversité musicale présentée sur ces plateformes » ;
• étude sur « la place des femmes dans la programmation des festivals de musique » ;
• « état des lieux sur le développement du livestreaming musical ».
Détail des 182,5 M€ de crédits d’intervention en soutien aux professionnels
7 M€ pour les auteurs et les compositeurs
- 5 M€ au titre d’un mécanisme général permettant de garantir aux auteurs compositeurs une rémunération minimale sur l’année de crise, « dont les modalités sont en cours de définition ».
- Cette dotation « permet d’amorcer ce fonds, qui sera réalimenté en cours de gestion ».
- 2 M€ pour mettre en place un dispositif de soutien direct à la création, selon des modalités qui « seront définies en concertation avec les organisations professionnelles concernées début 2021 ».
7 M€ en soutien à l’édition musicale
- 5 M€ au titre de la création d’un fonds exceptionnel de compensation des pertes et de sécurisation de l’emploi
- 2 M€ permettant d’accroître l’enveloppe du fonds de développement éditorial (auparavant opéré par le FCM), jusqu’à présent dotée de 250 K€.
131,5 M€ au soutien au spectacle vivant
- 115 M€ seront alloués à un fonds de sauvegarde destiné à contribuer à éviter les faillites et à sécuriser l’emploi, en contribuant à compenser les pertes d’exploitation des entreprises de spectacle en 2020 et au premier trimestre 2021
- 16,5 M€ pour soutenir l’activité au moyen d’un renforcement des aides sélectives au spectacle vivant.
- Ces mesures seront ajustées « en fonction des calendriers et des modalités de reprise de l’activité en 2021 ».
19 M€ pour la production et la distribution phonographique
- 5 M€ permettant de créer un fonds de sauvegarde pour la production phonographique et les distributeurs, « dont les modalités seront identiques à celles du fonds de sauvegarde spectacle »
- 10 M€ afin de compléter le fonds de relance des investissements, « qui sera par ailleurs adapté avec la suppression du seuil minimum d’investissement »
- 4 M€ visant « renforcer le dispositif de droit commun de soutien à la production phonographique (contre 2,4 M€ jusqu’à présent) ».
1,5 M€ de soutien exceptionnel aux disquaires indépendants
- Aider les disquaires à faire face aux arriérés de loyer
3,5 M€ pour les interventions territoriales du CNM
- Ce montant d’aide constitue « un triplement des moyens alloués aux partenariats avec les collectivités locales et les DRAC », pour « tenir compte de l’élargissement des missions de l’établissement à tous les métiers et toutes les esthétiques de la musique et des variétés ».
6,1 M€ pour des aides transversales du CNM
- 3,5 M€ pour la structuration de la filière et les actions d’intérêt général,
- dont 1 M€ pour les mesures en faveur de l’égalité femmes/hommes
- 2,6 M€ pour le soutien à l’export.
3,5 M€ pour la création d’un fonds de sauvegarde pour « les indépendants »
- Fonds dédié aux agents, managers, attachés de presse, entreprises individuelles et auto-entrepreneurs du spectacle.
4 M€ pour le fonds à la transition numérique et à l’innovation
- Fonds auparavant géré par la DGMIC, dont les moyens « sont doublés pour permettre l’ouverture du dispositif à tous les métiers de la musique et des variétés ».
32 M€ de crédits de 2020 reportés en 2021
• Les crédits du CNM non intégralement consommés en 2020 sont reportés en 2021.
• 27 M€ sont reportés pour le fonds de compensation des pertes d’exploitation liées aux mesures sanitaires
• 5 M€ sont reportés pour le fonds de soutien à la diffusion alternative
Six mois pour définir une stratégie sur les ressources nouvelles du CNM » (Jean-Philippe Thiellay)
La concertation autour de ce budget a-t-elle été difficile à mener, étant donné les inquiétudes très fortes qui persistent dans le secteur et des perspectives de reprise encore incertaines pour le spectacle vivant ?
La concertation permanente inscrite dans la loi du 30/10/2019, relative à la création du CNM, a produit ses effets. La concertation que nous avons conduite depuis octobre est passée par beaucoup d’écoute et d’explications. Elle s’est construite dans des groupes de travail, puis au sein du conseil professionnel et enfin à l’intérieur du conseil d’administration. Il existe un niveau d’écoute et de confiance, entre les professionnels du secteur et le CNM, qui est très satisfaisant. Ce budget visait la recherche d’un équilibre, et il a finalement été validé à la quasi-unanimité du CA, puisqu’il y a eu deux abstentions, celles du Prodiss et du SMA, mais qui ont été motivées par des considérations extérieures au budget.
Comprenez-vous les abstentions qui se sont exprimées ?
Le Prodiss s’est exprimé et a salué le travail réalisé au sein du CNM, qui n’est donc pas mis en cause dans les motifs de son abstention. J’ai indiqué hier que je comprenais que le conseil d’administration soit la caisse de résonance d’éléments externes. Les discussions ces derniers jours à l’Assemblée nationale au sujet du crédit d’impôt sur le spectacle vivant ont pesé lourd dans cette décision, et je le comprends.
Étant donné la situation encore très incertaine pour le spectacle vivant, ce budget et les crédits d’intervention pourront-ils évoluer en fonction de la situation ?
D’une part, nous allons réunir à nouveau le conseil d’administration, fin janvier ou début février 2021, pour préciser les conditions de mise en œuvre des dispositifs. Le 16/12/2020, nous avons uniquement voté le budget. Ensuite, le CA est tout à fait apte à procéder à des redéploiements, tout au long de l’année, si c’est nécessaire. Par exemple, on pourrait venir assez vite à bout du fonds de compensation des jauges dégradées, si la reprise se faisait avec une distanciation physique amenée à durer. Peut-être alors serait-il nécessaire de redéployer des moyens vers ce fonds. Le principe d’un établissement public, c’est l’agilité, et la capacité à s’adapter à la situation.
Le CNM est pour le moment financé directement par l’État, mais doit se projeter à plus long terme. Quelles sont les pistes de financement privilégiées pour l’avenir ?
Le projet du CNM ne fonctionnera dans la durée que si les sources de financement s’élargissent. La taxe fiscale sur les spectacles de musiques actuelles et de variétés, lorsqu’elle reviendra, en plus des 20 M€ de subvention de l’État et les apports des OGC, sur lesquels pèsent aujourd’hui la décision de la CJUE, ne suffiront pas à bâtir le CNM comme le législateur l’a entendu. Il faut réfléchir à d’autres types de ressources, et les six prochains mois doivent nous servir à définir une vraie stratégie avec l’État, et notamment sa DGMIC.
Parmi les pistes possibles, figurent l’évolution du champ de la taxe sur les spectacles, avec une ouverture à l’ensemble du champ musical, et donc le classique. Il faut y aller prudemment mais je suis persuadé que c’est une piste dont il faut explorer tous les recoins. D’autres sources fiscales sont possibles, les parlementaires ayant notamment évoqué une taxe sur les objets connectés. Et puis il y a aussi la question de la TVA sur la musique. Il est pour le moins étrange qu’une plateforme de streaming audiovisuel soit assujettie à une TVA à 10 %, quand un concert en livestreaming payant est à 20 %. Il faut aborder ce sujet avec les institutions européennes, et cela mérite au préalable une discussion avec l’État, qui définit la politique en la matière. L’objectif est donc que dans six mois, on y voit clair, parce que cet élargissement du financement du CNM nécessitera un travail de longue haleine.
Vous avez établi un protocole de lutte et de prévention contre le harcèlement et les violences à caractère sexuel, au respect duquel vous conditionnez l’attribution des aides allouées par le CNM. La musique montre-t-elle l’exemple ?
Le fait de conditionner les aides du CNM au respect de ce protocole est quelque chose d’assez fort, qui peut avoir des effets très bénéfiques, et qui a été voté à l’unanimité du CA et du conseil professionnel. C’est, nous ont dit certains membres du CA, une décision historique. Cela va nécessiter, de la part de l’ensemble des professionnels, d’informer et de former les salariés, de lancer une enquête interne lorsqu’un signalement est fait… C’est donc quelque chose d’essentiel, obtenu en très peu de temps. Et il s’agit là aussi d’un travail collectif. Notre protocole va très loin et peut, je crois, faire école dans le secteur culturel, même s’il existe déjà des initiatives dans d’autres domaines.
Le CNM va avoir un an. Quel bilan tirez-vous, dans cette première année particulièrement mouvementée ?
J’ai un sentiment mêlé au terme de cette première année. Je partage l’inquiétude, l’angoisse, la frustration et l’amertume exprimées par les professionnels. On aurait tellement aimé vivre une année normale pour la première année du CNM, pouvoir développer les nouveaux projets et réunir physiquement tout le monde. Mais j’ai aussi le sentiment d’accomplir le devoir d’un établissement public, et je suis très fier de l’équipe. Tout cela a permis, d’un certain point de vue, d’installer le CNM, dans son rôle de débat, de concertation permanente et de dispositifs d’action. Je suis par ailleurs fier que nous ayons pu mener à bien la fusion avec le Bureau Export, le FCM, l’IRMA et le Calif, et ravi, enfin, que nous ayons trouvé de nouveaux locaux pour tous nous réunir en 2021.