LES NEWS DE L’ÉDITION 02/2018

« En 2017, grâce à un report de subvention 2016 non reconductible, nous avons pu mener à bien une première réforme de notre dispositif d’aides directes, dont la dotation totale est passée de 600 K€ à 1,2 M€. Le relèvement de la subvention du ministère en 2018 permet donc de pérenniser cette réforme et de dégager 700 K€ supplémentaires. Ces ressources nouvelles vont nous permettre notamment de renforcer notre dispositif d’aides pour ajuster son dimensionnement aux enjeux du secteur et aux attentes des adhérents. Le conseil d’administration a validé en ce sens une série de mesures mi-décembre 2017 », déclare Marc Thonon, directeur général du Bureau Export, à News Tank le 12/01/2018. Il détaille ces mesures, parmi lesquelles le renforcement du programme d’aides classique, dont la dotation passe de 150 K€ à 200 K€, et du programme jazz, qui passe de 50 K€ à 100 K€.

Marc Thonon revient également sur l’intention de la filière musicale de renforcer, à son tour, sa dotation au Bureau Export, et sur la nécessité de faire évoluer le budget. « Nous sommes passés de 317 membres en 2016 à 430 adhérents en 2017. (…) Certes, nous sommes arrivés à un budget de 5 M€, mais la croissance du nombre d’adhérents et de demandes a fait baisser le montant moyen des aides accordées par dossier, de 3 000 à 2 000 €. Surtout, nous sommes dans un moment charnière pour l’industrie musicale. L’explosion des résultats de la filière à l’export ouvre des opportunités inédites, qu’il convient de saisir. Cela nécessite une montée en puissance du budget dans les deux à trois ans qui viennent. La filière, à travers la voix de TPLM, a clairement affiché l’objectif d’un budget du Bureau Export à 10 M€ », poursuit-il.

Marc Thonon évoque par ailleurs trois temps fort sur lesquels le Bureau Export sera mobilisé en 2018 : le festival Classical Next, à Rotterdam (Pays-Bas) du 16 au 19/05/2018, et le festival Reeperbahn, à Hambourg (Allemagne) du 20 au 27/09/2018, deux manifestations où la France sera le pays mis à l’honneur. Il annonce également la première édition des Bureau Export Days, à Paris, du 07 au 09/02/2018. « Nous invitons une trentaine de professionnels du monde entier (États-Unis, Pologne, Allemagne, Japon…) afin d’organiser des rencontres avec nos adhérents et aussi des showcases », précise-t-il.

Marc Thonon répond aux questions de News Tank.

© Christophe Crenel

Le ministère de la Culture a décidé d’augmenter sa participation dans le financement du Bureau Export en 2018, avec une subvention de 2,7 M€ (contre 1,4 M€ en 2017). Comment vont être utilisés ces fonds supplémentaires ?

D’abord, j’aimerais remercier vivement le ministère de la Culture qui n’a eu de cesse, depuis un an et demi, de soutenir notre projet et de nous accompagner dans notre développement. En l’espace d’un peu plus d’un an, la subvention du ministère de la Culture a progressé de 1,8 M€. Cela montre à quel point le rayonnement de nos industries culturelles et l’export de la musique sont devenus des priorités pour la « rue de Valois », et plus globalement pour les pouvoirs publics, MEAE et Parlement, qui nous a énormément soutenus. Nous entretenons avec eux une relation assez exceptionnelle, la perception de l’export de la musique a clairement changé.

En 2017, grâce à un report de subvention 2016 non reconductible, nous avons pu mener à bien une première réforme de notre dispositif d’aides directes, dont la dotation totale est passée de 600 K€ à 1,2 M€. Le relèvement de la subvention du ministère en 2018 permet donc de pérenniser cette réforme et de dégager 700 K€ supplémentaires.

Ces ressources nouvelles vont nous permettre notamment de renforcer notre dispositif d’aides pour ajuster son dimensionnement aux enjeux du secteur et aux attentes des adhérents. Le conseil d’administration a validé en ce sens une série de mesures mi-décembre 2017. Axe stratégique, le programme classique passe de 150 K€ à 200 K€ et voit sa dotation tripler en un an et demi. Ensuite, le programme jazz, genre musical qui n’avait aucune commission dédiée il y a encore quelques années, double en un an, passant de 50 K€ à 100 K€.

Le programme « Export 1 » sera doté de 200 K€ supplémentaires, pour un total de 600 K€Pour ce qui est des musiques actuelles, nous avons décidé de renforcer les deux bourses « Export 1 » et « Export 2 ». « Export 1 » est destinée à aider les premiers pas à l’international de projets, en soutenant des actions ponctuelles (voyage promotionnel, showcase, recherche de partenaires…). Le programme sera doté de 200 K€ supplémentaires, pour un total de 600 K€. Cela va nous permettre d’accroître notre capacité à accompagner des projets, sachant que nous avons reçu 65 % de dossiers supplémentaires l’année passée (de 120 demandes d’aides en 2016 à quasiment 300 en 2017), et à les accompagner plus efficacement, puisque nous avions relevé le plafond des aides, par projet, de 5 à 10 K€ en 2017. Notons que la croissance du nombre de dossiers reçus vient en partie du fait que nous avons revu les règles d’éligibilité pour l’obtention d’une aide : il fallait auparavant un phonogramme commercialisé pour prétendre à une aide, alors qu’aujourd’hui, seul un titre de l’artiste disponible sur une plateforme de streaming, même une vidéo sur YouTube, suffit.

Sur « Export 2 », programme destiné à soutenir la stratégie export développée autour d’un artiste déjà confirmé à l’international, il y avait auparavant trois niveaux de bourses : 10, 20 et 50 K€. Avec un plafond augmenté à 10 K€ en « Export 1 », le premier niveau de bourse n’avait plus vraiment de raison d’être. Nous avons donc reconfiguré le programme avec deux bourses, 25 et 50 K€, destinées à faire émerger des « champions de l’export ».

Par ailleurs, nous avons commencé à travailler plus étroitement avec les éditeurs en organisant des « writing camps », le dernier s’étant déroulé fin 2017 à Berlin. Nous travaillons sur de prochaines sessions au Brésil et au Canada anglophone. Idem, là encore, ces projets sont plus que nécessaires mais sont aussi coûteux, entre 10 et 20 000 €. Et les résultats sont là : deux œuvres écrites à Berlin vont être enregistrées par des artistes locaux.

De même, ces ressources supplémentaires nous permettent de financer trois opérations de grande ampleur. Des « focus France » seront organisés lors de deux événements mettant notre pays à l’honneur : le festival Classical Next, à Rotterdam (Pays-Bas) du 16 au 19/05/2018, et le festival Reeperbahn, à Hambourg (Allemagne) du 20 au 27/09/2018. Nous organiserons également la première édition des Bureau Export Days, à Paris, du 07 au 09/02/2018. Nous invitons une trentaine de professionnels du monde entier (États-Unis, Pologne, Allemagne, Japon…) afin d’organiser des rencontres avec nos adhérents et aussi des showcases.

Enfin, nous consacrerons des moyens supplémentaires à la régionalisation des actions de nos antennes de Londres (Europe du Nord) et de Berlin (Europe de l’Est).

Comment évoluent les apports des autres financeurs du Bureau Export, le MEAE et les organismes de la filière musicale ?

Le MEAE nous soutient au moyen d’une subvention de 239 K€ et de la mise à disposition de moyens humains et matériels dans les quatre antennes du Bureau Export présents à l’étranger, pour un montant évalué à 630 K€. À notre connaissance, ce périmètre est préservé.

Lors du CA de mi-décembre, la filière a affiché son intention de relever sa dotation de manière significative, de l’ordre de 300 K€ a minima. Au total, les apports s’élèvent à 2,9 M€ du côté de l’État et à 2,1 M€ du côté filière. Nous sommes donc à 5 M€.

Vous disiez, dans un précédent entretien donné à News Tank le 01/06/2016, qu’avec 5 M€, on aurait un « outil extraordinaire ». Le Bureau Export atteint-il sa vitesse de croisière avec un tel budget ?

La croissance du nombre d’adhérents au Bureau Export et de demandes a fait baisser le montant moyen des aides accordées par dossierNous sommes en train de construire cet outil. Ce que je mesurais mal lorsque nous nous étions entretenus, c’est à quel point le nombre d’adhérents allait croître. Nous sommes en effet passés de 317 membres en 2016 à 430 adhérents en 2017. Le nombre de structures classiques est passé de 60 à 94, et celles dédiées au jazz de 44 à 60. Certes, nous sommes arrivés à un budget de 5 M€, mais la croissance du nombre d’adhérents et de demandes a fait baisser le montant moyen des aides accordées par dossier, de 3 000 à 2 000 €. Surtout, nous sommes dans un moment charnière pour l’industrie musicale. L’explosion des résultats de la filière à l’export ouvre des opportunités inédites, qu’il convient de saisir. Cela nécessite une montée en puissance du budget dans les deux à trois ans qui viennent. La filière, à travers la voix de TPLM, a clairement affiché l’objectif d’un budget du Bureau Export à 10 M€.

Où en est le Bureau Export en termes d’implantation à l’étranger ?

Nous disposons d’une ligne de crédit pour le renforcement de l’antenne américaineNous travaillons sur le déploiement en Amérique du Nord. Dans le budget 2018, nous disposons d’une ligne de crédit pour le renforcement de l’antenne américaine. Frédéric Rebet (cofondateur de Naïve et ex-directeur général de Columbia France, NDLR) a été missionné sur le sujet et va nous remettre un rapport qui va nous servir de base pour le redéploiement de l’équipe. Difficile d’en dire plus pour le moment, mais l’idée serait de renforcer le bureau à New York et d’en ouvrir un autre à Los Angeles. Et de demander à ces deux équipes de rayonner sur le Mexique et le Canada.

Ensuite il y a la Chine, sur laquelle nous travaillons. C’est un territoire compliqué, sur lequel la solution n’est peut-être pas de créer une antenne mais un relais, qui travaillerait de manière très étroite avec les services culturels locaux. Ce n’est pas un poste très onéreux mais il va falloir le financer. Tout dépend de ce que la filière va, précisément, amener comme moyens nouveaux. La Chine intéresse beaucoup le monde du classique et aussi celui du jazz. Enfin, il y a l’Afrique, et particulièrement l’Afrique anglophone, qui est également un objectif : la monétisation des contenus y devient une réalité. Une « mission Afrique » sera menée au cours de l’année, ainsi qu’une « mission Amérique Latine », fin 2018 ou début 2019.

Enfin, comme je le disais plus haut, nous avons élargi le périmètre des antennes existantes, dans la mesure où le bureau de Berlin rayonne désormais sur l’Europe de l’Est, et celui de Londres sur la Scandinavie.

Le Bureau Export a livré, lors du Midem le 06/06/2017, un chiffre révélateur : 46 % des streams des artistes signés en France sont réalisés à l’étranger. Cette tendance a-t-elle un impact dans l’organigramme et les process des maisons de disques ?

La fameuse règle du « break your own market first » n’existe plusIl s’agit d’une statistique concernant les artistes soutenus par le Bureau Export. Si l’on prenait l’ensemble des artistes produits en France, cette part serait sans doute moins élevée. Mais quoi qu’il en soit, ce chiffre est assez révélateur d’une tendance, qui se confirme lorsqu’on voit avec quelle importance les maisons de disques considèrent l’export, Sony Music France venant par exemple de renforcer son département international, Tôt ou Tard d’ouvrir un bureau au Canada et Because une antenne aux États-Unis. L’export, ce n’est plus une ligne de plus dans le compte d’exploitation, c’est un relais de croissance primordial.

Le monde de l’export a changé : la fameuse règle du « break your own market first » (« réussis déjà dans ton pays », NDLR) n’existe plus. Des artistes comme Petit Biscuit ou Kungs ont commencé à l’international quasi simultanément à leurs débuts en France.

Ce qui incite désormais souvent les maisons de disques à travailler les artistes à l’international avant même que le succès arrive en France. Et dès que des succès se profilent sur un territoire, cela peut créer un effet « boule de neige », comme avec Christine & The Queens par exemple. Aux Grammy cette année, on dénombre 7 artistes français : 4 en musique classique et 3 en musiques actuelles. C’est un score que la France a déjà obtenu par le passé, mais nous sommes aujourd’hui représentés dans des catégories assez importantes.

Le ministère relance le chantier du Centre national de la musique. Dans le rapport de Roch-Olivier Maistre, se pose la question d’intégrer le Bureau Export au futur établissement. Quel est votre avis ?

Tout ce qui peut permettre de rassembler la filière est bon à prendre. Maintenant, il ne faut pas que le Bureau Export perde en dynamique et en agilité. Si la gouvernance du futur CNM est similaire à celle qui est la nôtre aujourd’hui, à savoir que toute la filière y est représentée (en dehors des artistes-interprètes mais qui devraient revenir bientôt), pourquoi pas. Néanmoins, si l’on regarde notre industrie la plus proche, celle du cinéma, on voit qu’Unifrance est un opérateur distinct du CNC. Les deux sont en lien, se parlent, et cela n’empêche en rien de fonctionner dans de bonnes conditions.

Ce qui fait la vertu du Bureau Export, et encore plus ces derniers temps, c’est que les adhérents siègent dans ses commissions et au conseil d’administration. Le Bureau Export est leur outil. Mon rôle est simplement de comprendre leurs besoins, d’organiser le travail de l’équipe et les programmes afin de satisfaire ces besoins, puis de trouver le plus d’argent possible pour permettre qu’ils puissent être comblés.

J’aimerais pouvoir mesurer l’impact en termes d’emplois, par exemple le nombre de contrats d’intermittents honorés grâce aux stratégies exportEnfin, vis-à-vis de nos financeurs, mon rôle est de livrer une étude d’impact qui permette de rendre compte de l’efficacité de notre action. Ce qui intéresse l’État, c’est le retour sur investissement, à la fois en termes de droits, d’emplois et de fiscalité. En 2016, 628 M€ de chiffre d’affaires ont été générés par la musique à l’export, dont 260 M€ revenant en France. En 2017, nous améliorerons certainement le volume global mais aussi le retour sur les finances françaises. Ce que j’aimerais pouvoir mesurer également, c’est l’impact en termes d’emplois, par exemple le nombre de contrats d’intermittents qui ont été honorés grâce aux stratégies export. Nous sommes en train de revoir nos systèmes d’information afin de pourvoir automatiser et extraire ces chiffres.