PASS SANITAIRE : LA DEMANDE DE SUSPENSION REJETÉE PAR LE CONSEIL D’ÉTAT
Paris – Actualité n°224749 – Publié le 27/07/2021
Le juge des référés ne suspend pas le décret du 19/07/2021 par lequel le Premier ministre a élargi l’obligation de présenter un pass sanitaire aux établissements de culture et de loisirs regroupant 50 personnes ou plus, à compter du 21/07/2021, annonce le Conseil d’État le 26/07/2021. Il juge « qu’en l’attente d’une nouvelle loi et compte-tenu de la récente dégradation de la situation sanitaire, avec une diffusion croissante du variant Delta, particulièrement transmissible, le Premier ministre avait le pouvoir de prendre une telle mesure ».
Le juge des référés a par ailleurs « rejeté les référés liberté au motif que le décret n’était pas de nature à porter une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales invoquées, la liberté d’expression et la libre communication des idées, la liberté de création artistique, la liberté d’accès aux œuvres culturelles, la liberté d’entreprendre et la liberté du commerce et de l’industrie ainsi que le droit au libre exercice d’une profession. La reprise de l’épidémie liée à la diffusion du variant Delta pouvait en effet justifier l’élargissement de l’utilisation du pass sanitaire ainsi que l’entrée en vigueur immédiate de cette mesure. Par ailleurs, la future loi relative à la gestion de la crise sanitaire devrait rendre prochainement caduc le décret contesté, qui ne sera donc encore en vigueur que pour quelques jours », ajoute-t-il.
Le Conseil d’État avait été saisi par plusieurs syndicats et organisations du spectacle vivant pour suspendre le décret du 19/07/2021 et « enjoindre au Premier ministre d’adopter des dispositions réglementaires octroyant aux acteurs du monde de la culture, et en particulier du spectacle vivant, un délai raisonnable avant l’extension du pass sanitaire qui ne puisse être inférieur à 45 jours, ou, à tout le moins, qui soit identique à celui accordé aux autres ERP, tels que, notamment, les cafés, restaurants et centres commerciaux ».
La SACD, qui portait un référé liberté, « regrette que la culture soit une fois encore stigmatisée et soumise à des mesures dérogatoires et spéciales prises dans la précipitation et sans qu’aucune justification précise à ce traitement discriminatoire ne soit avancée », indique-t-elle le 27/07/2021 en réaction à la décision du Conseil d’État. Elle appelle « à un soutien financier rapide et significatif de l’État pour compenser les pertes économiques des entreprises culturelles, mais aussi des auteurs qui ont, une nouvelle fois, été les grands oubliés des premières annonces réalisées pour le festival Off d’Avignon », rappelant que « la mise en œuvre prématurée du pass sanitaire, dès le 21/07/2021 (…) a déjà eu pour conséquence, dans les festivals comme le Off d’Avignon, de nombreuses annulations de réservations et une chute brutale de la fréquentation, (…). »
« Combiner un renforcement de la lutte contre la pandémie et l’adoption de mesures qui ne stigmatisent, ni ne pénalisent les acteurs de la culture » (SACD)
Un référé liberté contre la décision du Président de la République d’étendre le pass sanitaire aux lieux de loisirs et de culture dès le 21/07/2021 a été déposé au Conseil d’État le 15/07/2021. Ce référé a été déposé par la SACD, et signé par Chorégraphes Associé.e.s, le SNMS, la Fesac, AJC, les Écrivains Associés du Théâtre, le Syndeac, la Fevis, la CGT Spectacle, le SNSP, Profedim, Les Forces musicales, France Festivals et FASAP-FO.
- « La SACD rappelle qu’elle soutient la mise en œuvre d’un pass sanitaire dans les lieux de culture permettant d’éviter qu’ils soient de nouveau fermés. Mais elle contestait une mise en œuvre précipitée, immédiate et sans concertation, avant son déploiement dans les cafés et restaurants.
- Dans l’attente de la décision que rendra également le Conseil Constitutionnel sur la constitutionnalité de la loi votée par le Parlement concernant la gestion de la crise sanitaire, la SACD regrette que la culture soit une fois encore stigmatisée et soumise à des mesures dérogatoires et spéciales prises dans la précipitation et sans qu’aucune justification précise à ce traitement discriminatoire ne soit avancée.
- Le gouvernement n’était pas plus prêt que les lieux de spectacle et les salles de cinéma et modifie sans cesse depuis les modalités de la mise en œuvre de ces obligations : non application aux moins de 18 ans contre 12 annoncée initialement, les salariés des établissements n’ont plus l’obligation de réaliser des contrôles d’identité, le seuil de 50 spectateurs s’applique par salle et non par établissement avant, probablement, d’autres adaptations après la généralisation du pass sanitaire aux bars et restaurants.
- (…) La SACD demande au gouvernement de ne pas ignorer les conséquences négatives de son décret et de prendre ses responsabilités en adoptant quelques mesures urgentes de soutien et notamment :
- un renforcement de l’aide à la conception du CNC afin d’accompagner les auteurs dont les films sont récemment sortis ou dont les sorties sont décalées du fait de l’application de ces nouvelles mesures sanitaires ;
- la conclusion urgente d’une convention avec le ministère de la Culture pour pouvoir compenser au bénéfice des auteurs les pertes de recettes de billetterie depuis la réouverture des théâtres le 19/05/2021 ;
- l’ajout au Fonds provisionnel destiné à soutenir les artistes et les techniciens du festival Off d’Avignon, (…) d’un volet permettant également aux auteurs présents dans le Off de bénéficier d’une compensation pour pertes de recettes de billetterie.
- Par ailleurs, la SACD avait porté l’idée d’une nouvelle politique de soutien aux auteurs et de relance de la création, via un plan de commande d’écriture d’œuvres à des auteurs contemporains.
- La reprise de cette mesure par le ministère de la Culture, avec une dotation de 100 000 €, doit urgemment faire l’objet d’une communication plus vaste, auprès des auteurs comme des CDN qui peuvent y prétendre, afin que des projets de collaboration puissent être rapidement soumis au ministère et les premiers soutiens prochainement distribués.
- L’appel à projets, ouvert pour l’heure aux seuls CDN, doit aussi se renforcer et concerner plus largement les théâtres publics, notamment les scènes nationales. Cette extension était déjà utile. Elle est désormais indispensable, à l’heure où la fréquentation des théâtres risque de chuter lourdement au détriment d’auteurs déjà très fragilisés.
- Plus que jamais, le pays de l’exception culturelle doit savoir combiner un renforcement de la lutte contre la pandémie, à laquelle nous devons tous participer, et l’adoption de mesures qui ne stigmatisent, ni ne pénalisent les acteurs de la culture. »
La SACD le 27/07/2021
« Convoquer un CNPS plénier en septembre pour faire le point sur la situation et débattre de nouvelles mesures d’urgence » (Syndeac)
- « Cette décision du Conseil d’État est une nouvelle défaite : le Syndeac constate, encore une fois, “l’exception culturelle française” qui consiste à appliquer des mesures restrictives de liberté en priorité au secteur culturel avant l’ensemble des autres domaines économiques, ce qui traduit encore une fois la vision “non essentielle” de la culture. Les fréquentations de spectacles s’effondrent, sans que le Gouvernement ne semble réagir à ce stade.
- Les directeurs et directrices d’établissements culturels, quels qu’ils soient, ont déployé des protocoles sanitaires stricts, négociés avec le Gouvernement, et appliqués par les publics avec un sens civique remarquable. La mise en œuvre anticipée du passeport sanitaire est, dès lors, apparue très injuste.
- Les premières victimes de la mise en œuvre de ces mesures restrictives d’accès aux spectacles sont les jeunes et les populations fragiles, que les politiques vaccinales n’ont pas encore réussi à atteindre. Ce sont pourtant ces publics que les partenaires publics de nos adhérents nous demandent de toucher en priorité.
- Dans ce contexte, le Syndeac demande à la ministre de la Culture et au Premier ministre de convoquer, tout début septembre, un nouveau CNPS plénier pour faire le point sur la situation et pour débattre de nouvelles mesures d’urgence pour le secteur du spectacle vivant. Le Syndeac rappelle, par ailleurs, sa demande d’une clause de revoyure dans la mise en œuvre de l’année blanche, la mise en œuvre du passeport sanitaire entraînant des annulations de spectacles et la problématisation du juste règlement des contrats de travail liés. »
Le Syndeac le 27/07/2021
Le Conseil constitutionnel saisi après l’adoption définitive du projet de loi sur la gestion de la crise sanitaire
• Le Parlement a adopté le projet de loi relatif à la gestion de la crise sanitaire, sur le rapport de la commission mixte paritaire. Le texte, issu des travaux de la commission mixte paritaire, prévoit notamment : le refus de tout licenciement en cas de non présentation du pass sanitaire ou de non-respect de l’obligation vaccinale ; la fin du régime d’exception avancée au 15/11/2021 (au lieu du 31/12/2021), sauf nouveau vote du Parlement ; et le report du couperet, du 15/09/2021 au 15/10/2021, pour les professionnels déjà engagés dans une démarche vaccinale.
• Au lendemain de l’adoption définitive du projet de loi, le Conseil constitutionnel a annoncé avoir « enregistré une première saisine ». « D’autres lui ont été annoncées sur ce texte », précise-t-il. Il rendra sa décision le 05/08/2021.